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La loi organique n° 2020-035 du 30 juillet 2020, en ses articles 75 à 91, confère à la Cour des comptes le jugement des fautes de gestion appelé « discipline budgétaire ». Ainsi il a été défini les infractions, les personnes justiciables, la procédure de jugement et les sanctions.

  1. Les infractions

Constitue une faute de gestion toute atteinte aux lois et règlements régissant les finances publiques et plus particulièrement:

  • l'engagement d'une dépense, sans l'obtention du visa préalable dans les conditions prescrites par la réglementation en vigueur sur le contrôle financier de l'État;
  • la non prise en compte du refus de visa opposé par le contrôle financier à une proposition d'engagement de dépense sans l'obtention de l'avis conforme du ministre en charge des finances ;
  • l'engagement des dépenses sans l'obtention à cet effet de délégation de signature;
  • la modification budgétaire irrégulière;
  • le non respect des règles relatives au Code des marchés publics ;
  • le non respect de la législation et de la réglementation relatives à la gestion des fonctionnaires et des agents;
  • toute omission d'obligation de déclaration fiscale et sociale;
  • toute déclaration inexacte ou incomplète aux administrations fiscales ;
  • toute omission, en méconnaissance ou en violation des dispositions fiscales en vigueur, de remplir les obligations qui en découlent en vue d'avantager indûment des contribuables;
  • toute procuration ou tentative de procuration à autrui ou à soi-même, en méconnaissance de ses obligations et dans l'exercice de ses fonctions d'un avantage pécuniaire ou en nature non prévu par la réglementation y compris la surfacturation;
  • l'inexécution totale, partielle ou tardive d'une décision de justice passée en force de chose jugée entraînant la condamnation d'une personne morale de droit public ou d'un organisme soumis au contrôle de la Cour ;
  • le non respect des règles relatives à l'acquisition, à la gestion ou à l'aliénation du patrimoine mobilier et immobilier de l'État, des collectivités territoriales et leurs établissements publics;
  • toute infraction à la réglementation financière des collectivités territoriales et des établissements publics qu'ils soient nationaux ou locaux;
  • toute infraction à la réglementation financière propre aux entreprises publiques, sociétés d'État, sociétés à participation financière publique;
  • tout préjudice causé par les responsables à l'organisme public au sein duquel ils exercent des responsabilités, par des carences graves dans les contrôles qu'ils sont tenus d'exercer ou par des omissions ou négligences dans leur rôle de direction.

La poursuite de ces infractions devant la Cour ne fait pas obstacle à l'exercice de l'action pénale ou disciplinaire; dans le cas de poursuites pénales concomitantes, il est sursis aux poursuites devant la Cour des Comptes jusqu'à la fin de l'action pénale.

 

  1. Les personnes justiciables

  Sont soumis à la juridiction de la Cour des Comptes, les ordonnateurs, les administrateurs de crédits et leurs délégués.

Sont également justiciables au titre des fautes de gestion :

  • tout agent de l'État, tout membre d'un cabinet ministériel, tout agent d'une collectivité territoriale, tout agent d'un établissement public ;
  • tout représentant, administrateur ou agent des organismes qui sont soumis au contrôle de la Cour des comptes;
  • tous ceux qui exercent de fait, les fonctions des personnes désignées ci -dessus.

Les membres du gouvernement ne relèvent pas de la Chambre de Discipline Budgétaire et Financière.

  1. La procédure

Ont qualité pour saisir la Cour, par l'organe du Ministère Public :

  • le Président de l'Assemblée Nationale;
  • le Premier Ministre ;
  • le Ministre en charge des Finances;
  • les autres membres du Gouvernement pour les faits relevés à la charge des fonctionnaires et agents placés sous leur autorité et pour les faits relevés à la charge des organismes et des administrations placés sous leur tutelle;
  • la Cour des comptes.

Le Procureur Général près la Cour des comptes peut également saisir la Cour de sa propre initiative.

Sur la base des documents qu'il reçoit et des informations et autres documents qu'il peut demander aux autorités compétentes, le Procureur Général peut décider :

  • soit la poursuite, et dans ce cas, il sollicite du Premier Président la désignation d'un conseiller rapporteur chargé de l'instruction; il avise les personnes concernées qu'elles sont l'objet de poursuites devant la Cour et qu'elles sont autorisées à se faire assister par un avocat. Le Procureur Général informe également de cette poursuite le ministre ou l'autorité dont dépend ou dépendait le fonctionnaire ou l'agent mis en cause, le ministre en charge des finances et, le cas échéant, le Ministre de tutelle;
  • soit le classement de l'affaire s'il lui apparaît qu'il n'y a pas lieu d'engager des poursuites; il prend à cet effet une décision motivée qui est communiquée à la partie qui lui a soumis l'affaire.

Le Procureur Général peut revenir sur la décision de classement si, à travers les pièces et informations complémentaires qu'il reçoit, il lui apparaît qu'il y a des présomptions sur l'existence de l'une des infractions mentionnées ci-dessus.

 En cas de poursuite, le Conseiller rapporteur chargé de l'instruction est habilité à procéder à toutes enquêtes et investigations auprès de tous les organismes publics ou privés, se faire communiquer tous documents, et entendre toutes les personnes dont la responsabilité paraîtrait engagée, ou tous témoins après qu'ils aient prêté serment selon les formes et conditions prévues par le Code de Procédure Pénale.

Les séances d'audition sont consignées dans des procès-verbaux rédigés par le greffier. Si, au cours de l'instruction, l'intéressé et les témoins ne répondent pas aux demandes formulées par le conseiller rapporteur, ce dernier soumet un rapport au Premier Président en vue de statuer sur l'affaire conformément aux dispositions de l'article 48 de la Loi organique.

L'instruction est secrète.

Si l'instruction fait apparaître des faits susceptibles de constituer des délits ou des crimes, le Conseiller rapporteur établit un rapport administratif qui est communiqué au Procureur Général ; celui-ci en informe le Procureur de la République près le Tribunal de Grande Instance du lieu de commission de l'infraction et le Ministre dont relève l'intéressé.

Lorsque l'instruction est terminée, le conseiller rapporteur remet son rapport et l'ensemble du dossier au président de la chambre qui le communique au Procureur Général.

Le Procureur Général dépose ses réquisitions dans un délai de trente (30) jours à compter de la date de réception du dossier.

 L'agent mis en cause est informé qu'il peut dans le délai de quinze (15) jours à compter de la notification, prendre connaissance sur place, au greffe de la Cour, soit par lui-même, soit par l'intermédiaire de son avocat, du dossier le concernant. Il peut également obtenir, à ses frais, copies des pièces de son dossier.

La date de la prise de connaissance du dossier fait l'objet d'une mention au greffe.

Le dossier doit être complet et comporter notamment les réquisitions du ministère public. Dans le délai de trente (30) jours suivant la date de cette prise de connaissance, l'intéressé peut produire un mémoire écrit, soit par lui-même soit par son avocat.

Ce mémoire est communiqué au Procureur Général pour information.

 L'agent mis en cause peut personnellement ou par l'intermédiaire de son avocat solliciter la citation de témoins de son choix et ce, dans le délai mentionné à l'article 81 de la Loi organique.

 Lorsque le Premier Président estime, après l'examen du dossier, que l'affaire est en état d'être jugée, il ordonne qu'elle soit portée au rôle des audiences de la chambre compétente en matière de discipline budgétaire et financière.

La personne est convoquée quinze (15) jours au moins avant la date de l'audience.

Le président de la formation en matière de discipline budgétaire et financière assure la direction des débats et la police de l'audience.

Il peut prendre toute décision ou ordonner toute mesure qu'il estime utile.

Au début de l'audience, le conseiller rapporteur qui a instruit l'affaire donne une lecture résumée de son rapport. La personne mise en cause soit par elle-même, soit par son avocat, est appelée à présenter ses explications et justifications.

Le Président peut autoriser les témoins acceptés qui en auront fait la demande, appuyée de toutes justifications qu'il estime suffisantes, à ne pas comparaître personnellement à l'audience et à déposer par écrit. Dans ce cas, lecture est donnée par le greffier des dépositions écrites des témoins autorisés.

Le Procureur Général présente ses conclusions.

Des questions peuvent être posées par le président ou, avec son autorisation, par les membres de la formation, la personne mise en cause ou son avocat.

Le Procureur Général peut faire entendre les personnes dont le témoignage lui paraît nécessaire.

Tous les témoins dont l'audition est décidée, ne peuvent être entendus que sous la foi du serment, et dans les formes et conditions prévues par le Code de Procédure Pénale.

La personne mise en cause ou son avocat a la parole le dernier.

La formation délibère ; le Conseiller rapporteur participe au délibéré avec voix délibérative.

L'arrêt est rendu à la majorité des voix.

La Cour rend son arrêt dans un délai maximum d'un (1) mois à compter de la date de la mise en délibéré de l'affaire, lors d'une audience à laquelle est convoqué l'intéressé ou son représentant; cet arrêt est notifié dans le mois suivant son prononcé, à la personne mise en cause, au Ministre en charge des Finances, au Ministre intéressé, au Procureur Général, à la partie qui a saisi la Cour et aux représentants légaux des organismes concernés.

Il est communiqué au Président de la République.

  1. Les sanctions

 La Cour prononce à l'encontre des personnes ayant commis l'une ou plusieurs des fautes de gestion, une amende dont le montant calculé selon la gravité et le caractère répétitif de l'infraction, ne peut être inférieur à cent mille (100.000) francs par infraction, sans toutefois que le montant de l'amende par infraction ne puisse dépasser la rémunération nette annuelle que la personne concernée a perçue à la date de l'infraction.

Toutefois, le montant cumulé des amendes précitées ne peut dépasser quatre fois le montant annuel de ladite rémunération.

Si la Cour établit que les infractions commises ont causé une perte à l'un des organismes soumis à son contrôle, elle ordonne à l'intéressé le remboursement à cet organisme des sommes correspondantes, en principal et intérêts. Les intérêts sont calculés selon le taux légal, à compter de la date de l'infraction.

Si elle relève des faits de nature à justifier une action disciplinaire ou pénale, il est fait application des dispositions de l’article 79 alinéa 4 de la Loi organique.

 Si l'auteur de fautes de gestion bénéficie d'une rémunération autre que publique, l'amende dont il est passible est calculée en fonction de sa rémunération nette annuelle dans les conditions fixées à l'article précédent.

S'il n'est pas salarié, l'amende peut atteindre l'équivalent de la rémunération nette annuelle correspondant à celle d'un administrateur de l'administration centrale à l'échelon de rémunération le plus élevé.

Le principe de non cumul est applicable lorsque la Cour prononce plusieurs amendes contre une même personne. Ces amendes sont allouées à l'État, à la collectivité territoriale ou à l'établissement ou organisme intéressés.

Le recouvrement des amendes est assuré par le Receveur Général du Trésor, par le Receveur de la collectivité territoriale concernée, ou par le Comptable de l'organisme intéressé. Ils sont alors destinataires des extraits d'arrêts les concernant.

Ils poursuivent par tous moyens de droit, notamment par précompte sur les traitements, salaires et/ou revenus perçus par la personne condamnée.

Lorsque plusieurs personnes sont impliquées dans une même affaire, la formation peut se prononcer par un seul arrêt.

La personne mise en cause et les témoins qui ne répondent pas dans le délai imparti par la Cour aux demandes de communication de pièces et documents ou aux convocations qui leur sont adressées par la Cour, ou refusent de prêter serment ou de témoigner, peuvent être condamnés par ordonnance du Premier Président à une amende de cinquante mille (50 000) à cent mille (100 000) francs.

En outre, la Cour peut soumettre les personnes concernées à une astreinte de cinq mille (5 000) francs par jour de retard.

 Les auteurs de fautes de gestion ne sont passibles d'aucune sanction s'ils peuvent se prévaloir d'un ordre écrit préalablement donné par la personne légalement habilitée à donner un tel ordre.

 Les fautes de gestion ne peuvent plus faire l'objet de poursuites devant la Cour après l'expiration d'un délai de six ans à compter du jour où elles ont été commises.